mon travail est de répondre aux besoins des journalistes.
Il leur faut le plus souvent un dossier de presse avant de partir
en reportage, mais aussi, une documentation sur un sujet précis,
des vérifications, une recherche particulière sur
la presse d'un pays étranger, etc.
Au quotidien, mon travail est d'abord d'alimenter notre fonds documentaire
: nous travaillons avec des dossiers thématiques, des dossiers
"personnalités" et des dossiers par pays. Le service
économie a aussi une partie de dossiers "entreprises",
dont je n'ai que rarement besoin en fait. Avec ma collègue
(nous sommes 2 à faire ce travail de documentation pour le
service Monde), nous dépouillons 11 quotidiens, 12 hebdomadaires
et une trentaire de revues plus ou moins spécialisées.
Cela veut dire que nous lisons, indexons ces journaux, magazines
et revues. Que des archivistes les découpent et les classent.
Ensuite, nous avons à répondre aux questions des journalistes,
ce qui suppose une partie de recherche dans nos dossiers, mais parfois
aussi sur bases de données (Lexis-Nexis et Européenne
de Données essentiellement) et sur Internet.
Nous devons aussi gérer nos dossiers documentaires, en élaguant,
subdivisant des dossiers trop complexes ou trop volumineux. Nous
sommes entièrement responsables de l'évolution de
nos dossiers. Plus notre manière d'indexer est précise,
plus il nous est facile de répondre vite et bien aux questions.
Mais afin de constituer des dossiers cohérents, il ne faut
pas non plus éparpiller les papiers entre trop de dossiers
....
Nos
tâches quotidiennes sont en train d'évoluer depuis
que le service s'informatise. Cela peut sembler fou mais le service
a fonctionné exclusivement sur papier jusqu'à janvier
2004. La mise en place d'un outil informatique est très coûteuse,
très complexe (pour garder l'originalité et l'efficacité
de notre système de classement) et très longue. Je
pourrais peut-être vous en dire plus dans quelques mois sur
le quotidien d'un service de documentation de presse totalement
informatisé !
Cepid : Pouvez-vous nous
décrire vos satisfactions personnelles dans votre travail,
vos moments de grâce ?
J.
C. : La vraie chance du documentaliste de presse, c'est
à mon avis de pouvoir lire presque toute la journée
! J'ai appris ici en 5 ou 6 ans bien plus que pendant toutes mes
études !
Après, c'est vrai qu'il est plutôt gratifiant de s'entendre
dire merci par un journaliste plutôt bougon, et qu'il finit
par être parfois excitant de faire une recherche un peu tordue
et de trouver. Ici, la parution est hebdomadaire, il est finalement
assez rare de travailler dans l'urgence. Mais ces moments d'urgence
peuvent aussi être très intéressants sur le
plan professionnel : c'est souvent là qu'on se sent le plus
indispensable aux journalistes.
J'ai
toujours pris beaucoup de plaisir à travailler dans ce service.
Mais j'avoue être assez pessimiste sur l'évolution
du métier, vers une totale informatisation. Je sais que cela
peut choquer certains (qui diront que je suis ringarde et qu'il
faut bien s'y faire, c'est comme ça, plus performant, plus
rentable etc), mais ici, l'informatique fait perdre énormément
de la valeur humaine de ce travail. Nous sommes un service de 15
documentalistes, 3 archivistes, 2 assistantes et l'esprit d'équipe
est assez important. L'informatique brise un peu la nécessité
de travailler ensemble ....
Cepid
: Vous devez avoir parfois le sentiment d'effectuer un travail caché,
par opposition au journaliste qui signe son article ? Comment le
vivez-vous ?
J. C. : Je n'ai jamais eu ce sentiment. Et à
la limite, je crois que je préfère cette idée
de travailler "cachée". Cela dit, je crois que
le documentaliste et le journaliste ne font pas du tout le même
travail. Nous n'avons pas "le droit" de donner un avis,
une orientation à nos dossiers. C'est au journaliste de faire
son analyse des faits.
Quand la documentation fait vraiment un travail propre, une chronologie
par exemple, l'article peut être signé par le service
à part entière. Cela arrive rarement à L'Express
mais c'est déjà arrivé. D'ailleurs, à
l'Express, tous les documentalistes ont le statut de journaliste.
Cepid
: Le fait de travailler pour une rédaction entraîne
sans doute pour vous des astreintes, des contraintes liées
aux dates de parution ?
L'Express
paraît le lundi. Nous avons une soirée de bouclage
par semaine, le jeudi. Deux documentalistes restent pour assurer
les dernières vérifications. Finalement cela ne revient
qu'une fois toutes les 6 ou 7 semaines ... En revanche, si un événement
très important le demande, nous savons que nous pouvons rester
au delà de nos horaires habituels !
Cepid : Quelle formation
avez-vous suivie, avec quels bénéfices et quels regrets
?
J.
C. : J'ai suivi un double cursus histoire et géographie.
J'ai une maîtrise d'histoire moderne. Et je suis passée
par l'INTD, que j'ai fait en 2 ans, en alternance avec un contrat
de qualification à l'Express. Ma grande chance a été
d'abord d'entrer à l'INTD, où j'ai répondu
à l'offre de l'Express, qui m'a prise en contrat de qualification.
Ensuite j'ai bénéficié des 35 heures et j'ai
été embauchée définitivement sur le
poste créé. Pour moi, c'était tout bénéfice
!
Mes regrets : désolée pour l'INTD mais soyons honnête,
j'ai appris beaucoup plus sur le tas qu'à l'école.
Ma formation initiale et mes langues m'ont bien plus servies que
les cours .... Cela dit, sans le passeport INTD, je ne serais pas
là où je suis ! Du coup je regrette de ne pas avoir
peut-être approfondi certaines choses en informatique, d'autres
en management .
Cepid : Quelles sont les qualités personnelles
qui vous servent le mieux dans l'exercice de votre métier
?
J.
C. : L'écoute, la curiosité et la capacité
à travailler en équipe me semblent les principales
qualités nécessaires à ce genre de métier
! Bien sûr il faut un minimum de culture générale
mais ça, finalement, ça s'apprend !
Cepid : Et si c'était
à refaire ?
J.
C. :Je crois que je referais la même chose. Il y
a les avantages matériels (qualité de l'environnement,
stabilité de l'entreprise, rémunération, etc),
et des avantages plus "intellectuels" (qualité
du travail, des contacts) ; mais aussi les inconvénients
(pas de grande évolution possible, pas de "grande"
prise de décision, etc).
Cepid
: Merci beaucoup
!
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